A l’heure où la frénésie du Mondial 2018 déchaîne les foules masculines, où beaucoup de femmes se sentent délaissée et mises à l’écart, où les écrans verts envahissent nos rues… Avouons que cette question tombe à pic : mais pourquoi donc, plus que tout autre sport, les messieurs sont-ils autant envoûtés par le football ? Etre assis sur les gradins d’un stade où se dispute un match, on peut encore comprendre l’excitation des spectateurs qui monte : sentir le parfum des pelouses vertes et fraîches, apercevoir les visages des joueurs qu’on adore, participer à la joie collective… Mais, le vrai supporter, qu’il soit en live ou devant son petit écran, son excitation est toute aussi intense. On va même jusqu’à parler de dépendance pour certains. Car attention, pour le grand footeux, on élabore son planning et son agenda en fonction des dates des matchs. Et pour suivre à la lettre le calendrier de l’année footballistique, on ne vous raconte pas tous les sacrifices et toutes les disputes qui en découlent. Vacances, sorties, soirées, voyages… Tout ça est relégué au second plan s’il y a une Coupe du Monde ou d’Europe dans les parages. En cette période d’invasion footballistique, il est bon de se demander ce que les hommes peuvent bien trouver à ce sport. Pourquoi sont-ils si nombreux à s’entasser sur les gradins ou à rester scotchés devant leur poste de télé les yeux rivés sur le ballon rond ? Qu’est-ce qui les saisit autant au moment d’un but et pourquoi diable semblent-ils encore plus émus devant un match que devant tout autre évènement intime de leur vie quotidienne ?
Pourquoi un tel engouement masculin ?
Parce que c’est une activité virile avant tout. Au moment du but, les hommes ressentent un fort sentiment d’appartenance à une espèce en voie de disparition : le mâle, guerrier, courageux, patriote et solidaire. Et même si depuis quelques années, de plus en plus de femmes veulent s’approprier cette même passion, les plus machos ne veulent rien entendre : le foot reste incontestablement le sport du « sexe fort » qui se joue entre gars. Les femmes n’ont rien à voir là-dedans. En vérité, même si les époques et les mentalités évoluent, ils n’on pas tout à fait tort. Depuis l’enfance déjà, les petites filles jouent à la poupée, à la mariée et aux dînettes. Les petits garçons, eux, taquinent la baballe à longueur de temps.
Un concept collectif
Déjà, on le remarque souvent, le foot se transmet généralement de père en fils. Et puis ce sport a quelque chose de chaleureux et de convivial : on se retrouve toujours avec le même groupe de potes, les mêmes visages et parfois les mêmes endroits. Il y a donc un véritable sentiment de rapprochement et de lien qui perdure. Inconsciemment, on ressent une forme de stabilité, de cadre rassurant, de zone de confort et de repères familiers. Mieux encore, le football rapproche les mêles entre eux : comme si on parlait la même langue, lorsqu’on supporte la même équipe, il y a tout de suite des atomes crochus. Lorsqu’on est regroupé quelque part, même quand on ne connaît pas les nouveaux venus, le lien se forme automatiquement. Comme l’explique Adil, 38 ans : « Pour moi, le football va au-delà du simple jeu : c’est le lieu où l’homme se bat avec des règles précises. C’est aussi une sorte de regroupement collectif : on peut parler de foot dans le monde entier et déclencher aussitôt de la sympathie envers des inconnus.» Un peu de jargon footballistique, de grandes affinités pour la même équipe, quelques bières partagées et nous voilà amis de longue date !
Un vrai théâtre émotionnel
Le foot a aussi son lot de suspense et de surprise. Il déclenche un cocktail d’émotions indescriptibles. On y entre le cœur rempli d’espoir et on en sort souvent avec des sentiments contrastés. Et, avouons que pendant le match, l’attitude des hommes est fascinante : autant au quotidien, ils ont beaucoup de mal à extérioriser leurs ressentis, autant là c’est le total lâcher prise. Observez-les bien : ils font leur propre cinéma. Ils hurlent de rage pour exprimer la colère ou l’impuissance, sautent de joie dans les bras de leurs voisins dès que la victoire s’annonce, dévoilent leur angoisse, s’agitent comme des enfants, chantent à tue-tête, versent même parfois des larmes de bonheur ou de déception… «Non seulement j’adore les sports d’équipe, mais en plus je trouve que le foot met en avant de réelles valeurs masculines. Et bien que certaines personnes de mon entourage trouvent ce sport puéril ou primaire, je suis fan de tous les débordements émotifs qui s’enchaînent suite à un match. », souligne Nabil 29 ans. Autrement dit, jamais vous ne les verrez montrer leurs sentiments de manière aussi intense dans d’autres contextes. Bref, c’est ça la passion du foot.
Un état d’esprit résolument masculin
Pourquoi le foot plus que d’autres sports ? Parce que le foot est le référent universel qui est pratiqué dans le monde entier. C’est un jeu simple, qui a une unité de lieu, de temps et d’action. Mais c’est aussi et surtout, le moment où l’on se retrouve entre personnes du même sexe. Comme l’explique Aziz, 35 ans, un inconditionnel : «Le foot est une véritable rencontre rituelle avec mes potes et mon épouse a fini par l’accepter. C’est un espace qui dépasse le cadre sportif : le seul qui demeure en dehors des femmes ». Effectivement, elles ne vont pas pouvoir s’identifier à Benzema, Messi ou Ronaldo. Si elles les admirent pour leur maîtrise du ballon, l’argent qu’ils gagnent, leur physique… devant le miroir, leur image ne peut pas leur renvoyer celle d’un joueur de foot. En revanche, contrairement à elles, les hommes vont vraiment s’y identifier, se les approprier, les rejeter ou les admirer.