Meryeme laraki, mère-courage

Lorsqu'on rencontre Meryeme Bouzidi Laraki pour la première fois, on ose à peine la regarder dans les yeux tant son histoire est dure. Son fils de 13 ans, Reda, s'est suicidé par pendaison en 2009. Son regard est comme un miroir reflétant notre propre peur de la mort. Mais de la dame, émane une telle force et de son comportement un si grand courage que l'on est obligé de l'admirer. Suite à ce drame, elle a lâché sa carrière de pédiatre pour se consacrer à la création d'une association de prévention du suicide, baptisée Sourire2Reda (www.sourire2reda.org). Depuis, elle n'a eu de cesse d’œuvrer pour venir en aide aux jeunes en mal de vivre par le biais d'actions de terrain comme des interventions en milieu scolaire, la création d'un site web dédié, la formation d'un personnel écoutant pour son service (unique au Maroc) de tchat écoute qui reçoit des centaines de demandes par an : Stop Silence.

Sur tous les fronts

Elle anime et modère des comités-ateliers de lycéens une fois par semaine pour élaborer un plan d'action, véritable guerre déclarée au mal-être qui ronge la jeune génération en proie au harcèlement virtuel, à l'angoisse existentielle ou à des problèmes qui peuvent paraître insurmontables à cet âge. Dynamique, enjouée, empathique, elle mène un combat difficile et prend les choses avec ironie, disant de son fils disparu mais qu'elle pense être désormais toujours à ses côtés, qu'au moins, quand elle voyage en avion, « il n'a plus besoin de payer son billet. » Cette quinqua maman de deux autres ados a dû professionnaliser sa peine pour rester debout et à force, est devenue une experte de la question. En cela, elle est un exemple d'abnégation et de pugnacité, une mère-courage.

Le suicide des jeunes est un problème de santé publique dont le taux augmente d'années en années, au Maroc comme à l'étranger, et qui exige des gens comme Meryeme Laraki pour être contré.

 

 

Quelle est l'actualité de l'association pour la rentrée 2015 ?

L'équipe de Stop Silence reprend ses tchat écoutes avec les jeunes le 7 septembre. Nous aurons également une formation "écoute et évaluation du risque suicidaire" animée par les formateurs canadiens. Nous organisons une levée de fonds dans le cadre d'un événement international pour lequel nous avons conçu un "concept store" qui ​nous permettra d'informer de l'existence de Sourire de Reda. Le Comité de jeunes reçoit de nouveaux candidats "ambassadeurs": séances de recrutement, réunion d'information aux parents...

 

N'êtes-vous jamais découragée et que vous dites-vous lorsque cela arrive ?

Oui, cela m'arrive ​quand je prends conscience de tout ce qu'il y a à entreprendre, quand on doit freiner nos activités par manque de ressources humaines formées au métier de la gestion de la crise suicidaire. À ces instants là, c'est la dynamique qui est aujourd'hui installée, qui elle n'est pas dans l'émotionnel, qui me pousse et me ramène sur la vague.

 

Que conseiller à une maman dont l'enfant montre une tendance suicidaire ?

Ne pas hésiter à demander de l'aide rapidement auprès d'un aidant spécialisé (médecin, psychologue, toute personne qui est dans la relation d'aide) et trouver la ou les personnes à qui elles peuvent se confier et sur lesquelles elles peuvent s'adosser. Lire "le suicide" de Paul Quinnet me semble un bon moyen d'appréhender le suicide avec familiarité, pour comprendre ce qui se passe.