Triste nouvelle vendredi à Washington. La doyenne de la Cour suprême, Ruth Bader Ginsburg, s’est éteinte à l’âge de 87 ans des suites d’un cancer métastatique du pancréas. Et c’est un deuil national. Juge progressiste érudite, véritable icône du féminisme et des droits des femmes, Ruth était une révolutionnaire extrêmement populaire, respectée et redoutée dans le pays. Deuxième femme juge de la Cour suprême des Etats-Unis, son pouvoir était immense et son combat pour les femmes, les minorités et l'environnement restera exemplaire. Cette grande dame était qualifiée de « colosse du Droit » par le président républicain Donald Trump qui n’attendait qu’une chose, lui trouver un successeur de son clan pour faire trembler les démocrates. Or, celle qu’on surnommait « RBG », a confié quelques jours avant sa mort sa dernière volonté à sa petite fille, Clara Spera : « Mon voeu le plus cher est de ne pas être remplacée tant qu'un nouveau président n'aura pas prêté serment ». Même son de cloche du côté du rival démocrate de Trump, Joe Biden, qui ne souhaite pas qu’on la remplace aussi vite et qui a salué la mémoire de cette magistrate hors pair : « Ruth Bader Ginsburg s'est battue pour nous tous, et elle était très aimée (…). Elle était une héroïne américaine et une voix infatigable dans la quête de l'idéal américain suprême : l'égalité de tous devant la loi ». De son côté, autre fervent admirateur de cette iconique lady, Barack Obama, a tweeté : « Elle s'est battue jusqu'au bout, avec une foi inébranlable en notre démocratie et ses idéaux ». Frêle mais pourtant géante dans l’histoire de l’Amérique, Ruth avait été nommée à la haute cour par le président Bill Clinton en 1993. Mais, son charisme et son intelligence avaient déjà brillé dans elle les années 70, période où débutait sa lutte acharnée pour la cause des femmes. Brillante, fière, indépendante, influente, remarquable…Politiciens et juristes ne tarissent pas d’éloges sur cette championne du Droit qui s’est également mouillée la chemise au cours de sa carrière pour la défense des homosexuels ou des migrants. Très aimée et respectée par la jeunesse américaine, elle avait même été surnommée « Notorious RBG », en référence à un rappeur assassiné en 1997, « Notorious BIG ». Son look ultra-classique, reconnaissable entre mille, était une signature qui lui collera à la peau : un jabot sur sa robe noire, collier de perles, gants en dentelles et chignon bas. Un style unique qui fera même le fond de commerce de plusieurs produits dérivés à son effigie. Et s’il n’y avait qu’une seule anecdote à retenir de son parcours, ce serait sûrement celui de la période compliquée à sa sortie de Harvard, où elle s’était retrouvée chômeuse à New York. En effet, les cabinets d'avocats lui avaient fermé la porte au nez : « J'avais trois choses contre moi. Un, j'étais juive. Deux, j'étais une femme. Mais, le plus grave, c'était que j'étais la mère d'un enfant de quatre ans », raconte-t-elle amusée. Quelle sacrée ironie du sort. C’est à ce moment là, motivée par la révolte et la hargne, que la jeune femme devient une militante acharnée des droits des femmes. Malgré les années et les problèmes de santé, avec sa voix fluette et tassée dans son fauteuil, Ruth refusait de tirer sa révérence. La doyenne de l'institution maintenait son siège et ne souhaitait pas prendre sa retraite. Mais depuis l’année dernière, les hospitalisations se succèdent et son cancer prend de l’ampleur. Malgré tout, la « machine » qu’elle était croyait encore dur comme fer qu’elle pouvait poursuivre ses fonctions. Hélas, le destin en a voulu autrement. RBG a finalement battu en retraite. Et depuis l’annonce de sa disparition, les hommages ne font que pleuvoir. Devant le siège de la Cour suprême à Washington, des centaines de personnes viennent saluer la mémoire de cette guerrière en y déposant des fleurs et des bougies. Qu’elle repose enfin en paix…
Par Nafissa El Bouanani