Et si cette année, vous preniez la résolution de passer un peu moins de temps à surfer sur le Net au profit d’un bon bouquin à l’ancienne ? Histoire de déconnecter un peu, il n’y a rien de plus grisant que de plonger son nez dans un roman passionnant. En manque d’inspiration ? Voici trois auteurs qui méritent le détour.
« Best-seller » de Reda Dalil
Après avoir reçu le Prix de la Mamounia 2014 pour son premier roman à succès « Le Job », l’écrivain marocain récidive avec « Best-Seller » (éditions Le Fennec) et reçoit en 2016 la mention spéciale du jury dans le cadre de la quatrième édition du Prix de la littérature arabe. Le jeune auteur signe là une superbe autofiction qui sort des sentiers battus. On y retrouve des problématiques sociales, morales et existentielles, liées à la corruption, la superficialité de la classe bourgeoise ou encore le déclin du livre au Maroc. Avec une plume simple mais non moins accrocheuse, il nous transporte à travers le monde, nous gratifiant sans cesse de détails et de descriptions. Le tout dans un ton léger, tranchant et élaboré. La thématique centrale tourne autour du syndrome de la page blanche, inspirée de son propre vécu. Son personnage central, Bachir Bachir, est un écrivain soumis aux nombreuses contraintes de l’écriture. En totale déchéance, il n’arrive pas à écrire une ligne alors que son éditeur le met sous pression. Pour couronner le tout, il est exhorté à répondre aux besoins financiers exorbitants de son ex-femme Fedwa. Endetté jusqu'au cou, dépressif, il n'aura d'autre choix pour s'en sortir que d'écrire un roman à succès. Comment va-t-il renaître des ses cendres et sortir de ce cercle vicieux? Mélangeant autodérision et satire, comme à son habitude, Dalil a l’art de nous bluffer et de nous mettre en haleine.
« Nos plus beaux jours » de Moha Souag
Conteur contemporain au regard humaniste et incisif, Moha Souag a sorti un 6ème roman empli de profondeur et de sincérité. « Nos plus beaux jours » (Editions du Sirocco) fait office d’hommage aux femmes passionnées et courageuses qui ont traversé avec ténacité les épreuves de la vie. Le livre raconte l’histoire des vies croisées de deux femmes de caractère, libres et vibrantes de désir : Mouna, une chorégraphe moderne et audacieuse qui transmet son art de la danse à la jeunesse, et Haja Halouma, fan inconsidérée de Abdelhalim Hafez, mariée contre son gré et maltraitée par son époux. Ces deux supers-héroïnes décalées nous entraînent vers un voyage émotionnel où éclose la dualité entre la beauté d’une culture ancestrale et les valeurs d’ouverture que porte la modernité. A travers ces portraits féminins émouvants, de nombreuses interrogations émergent dans le roman, portées sur les injustices sociales mais également la réalité de l’art et de la culture dans le Royaume. A travers l’image de la danse, c’est aussi un hommage profond à la liberté et à l’énergie libératrice des corps. Moha Souag nous livre ici un bref récit mû par un élan lyrique, tout en émotion sincère, comme une danse qui fait exulter le sens retrouvé de la liberté…
« Combien veux-tu m'épouser ? » de Saphia Azzeddine
Après avoir mis en scène avec succès des jeunes femmes musulmanes et révoltées dans « Confidences à Allah » et « La Mecque-Phuket », Saphia s'attaque maintenant à la haute société, avec un regard tendre et cruel à la fois, abordant les beaux quartiers de Paris dans « Combien tu veux m'épouser ? » (Grasset). Le récit raconte l’histoire de Tatiana, une bécasse sentimentale issue de la jeunesse dorée, qui doit épouser Philip, un bel anglais rencontré sur une île des Seychelles. Sauf que les choses se compliquent vite. Le prétendant cache des intentions peu avouables. Anastasia, la belle et rebelle soeur de Tatiana, fait tout pour que le mariage capote... Une fois encore, la romancière franco-marocaine réussit une satire sociale parfaite. L’analyse, la drôlerie et le pathétique se mêlent à un sens de l’observation pointu. Véritable plongeon dans le monde impitoyable des grandes familles mondaines, le lecteur ne se lasse pas de la plume délicieusement acide de l’écrivaine. Plus mûre et plus glamour vache que jamais, Saphia tourne le conte de fée en cauchemar. Lutte des classes, coups de théâtre et rebondissement sont au programme.