Page 18 - GraziaMag.ma N°047 Août 2020
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                             DU MOMENT









           DISPARITION

          08/ GISÈLE HALIMI


                LE DROIT


          DE CHOISIR



          Elle a été l’une des doyennes du
          mouvement féministe. Le monde
          apprend avec tristesse le décès
          de cette célèbre avocate, à l’âge

          de 93 ans. Par Nafissa EL BOUANANI


               eine du barreau, militante de la première heure pour
               les droits fondamentaux des femmes, Gisèle Halimi
               aura combattu toute sa vie pour des causes qui lui
               tiennent à cœur. À l’instar d’une Simone Veil, l’une
          R de ses grandes amies, elle était la voix pour toutes les
          femmes. Déterminée, rebelle et perspicace, Gisèle s’est
          longtemps battue pour la libéralisation de l’avortement et la
          criminalisation du viol. Dénonçant haut et fort le sexisme
          depuis toute jeune, son parcours restera exemplaire. Née en
          Tunisie dans une famille juive, en 1927, elle a très tôt fait
          face aux inégalités entre les genres, comprenant rapidement                                                Photo DR
          qu’être une fille était une forme de « malédiction ».
          Déterminée à dénoncer l’injustice à la maison, et refusant
          d’être cantonnée aux tâches ménagères alors que ses frères   débat sur l’accès au droit à l’interruption volontaire de
          en étaient dispensés, elle a fait une grève de la faim à   grossesse. L’avocate mettra ainsi sa pierre à l’édifice en
          seulement 10 ans. Résultat : la féministe en herbe a   défendant magistralement une jeune fille poursuivie pour
          remporté sa première bataille. Celle d’une très longue liste.   avoir avorté. Ce fameux procès de Bobigny restera dans les
          Quelques années plus tard, à 16 ans, alors que sa famille la   annales. Quatre ans plus tard, la loi Veil pour la
          pousse à épouser un riche marchand du double de son âge,   libéralisation du droit à l’avortement verra le jour. Autre
          Gisèle se révolte là encore et refuse de céder à la pression   coup de maître : Gisèle défendra deux jeunes femmes
          sociale. Elle impose ses idées et finit par s’envoler à Paris   victimes d’un viol collectif  et finit par déclencher
          pour entamer des études de droit. Son destin, elle a voulu   l’adoption d’une loi en 1980 qui définit le viol comme un
          le prendre en main et suivre la route qui mène à la justice   crime. Les miracles s’enchaînent et la dame de fer poursuit
          pour les femmes. De la justice tout court d’ailleurs.   ses combats au fil des années. Elle s’engagera notamment
          Puisque, à la trentaine, elle lutte ardemment pour    pour la dépénalisation de l’homosexualité ou encore pour
          l’indépendance de l’Algérie et de tous les pays colonisés.   l’abolition de la peine de mort. Rien ne l’a jamais arrêté,
          Elle fait entendre sa voix un peu partout et marque les   Gisèle allait toujours au bout de ses convictions et de ses
          esprits avec son franc-parler, sa volonté de fer et son   valeurs. Une passionnée de justice qui se battait contre
          aplomb hors pair. Vient ensuite un autre combat acharné,   vents et marées pour obtenir gain de cause. C’était une
          celui de l’avortement. En 1971, Gisèle installe fièrement   femme, moderne et singulière, qui aura inspiré bien des
          son nom aux côtés des signataires du Manifeste des 343,   générations de féministes. Après avoir mené tant de
          publié par le Nouvel Observateur. Aux côtés de tant de   batailles sans relâche, elle mérite amplement le repos
          femmes fortes qui assument leur avortement et ouvrent le   éternel… Paix à son âme. ■


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