Page 23 - GraziaMag.ma N°043 Mars 2020
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           02/ CLAIRE BRETECHER


        LE DESSIN ENGAGÉ






           Auteure à succès de bandes dessinées dont
           la verve comique a dépassé les frontières
           de l’hexagone, Claire Bretecher, la « mère »
           d’Agrippine décédée en février 2020.
           Retour sur le parcours de cette féministe
           pas comme les autres. Par Sofia BENADI







                 ’était une grande dame de la bande
                 dessinée française. Probablement la
                 seule qui ait croqué avec autant de
                 justesse, la génération des babys                                                                        Photos DR
            C boomers et ce, dans un univers
            essentiellement masculin. Ses confrères
            de Cabu à Gotlib en passant par René                                   1976 par Roland Barthes avait fait du
            Goscinny lui-même admiraient ses                                       féminisme, le fil rouge de son travail,
            personnages si proches de la réalité :                                 évoquant avec soin la maternité, le
            depuis les fameux « bourges » de gauche                                mariage, l’avortement, la sexualité et tout
            dans Les Frustrés dans les années 1970 à                               ce qui était au cœur même de la société
            l’adolescente rebelle et complexée                                     avec impertinence et justesse. Et c’est
            d’Agrippine dans les années 1980. Et si                                sans doute dans Le destin de Monique
            Claire Bretecher a su s’imposer dans                                   qui voit le jour en 1983 que l’insolente
            l’univers compliqué de la BD, c’est bien                               acuité de son regard sera des plus
            parce qu’elle a su imposer un style                                    visionnaire lorsqu’elle raconte l’histoire
            mordant. Celle qui avait d’ailleurs été                                d’une jeune actrice désireuse de faire
            qualifiée de « sociologue de l’année en                                appel à une mère porteuse pour mettre
                                                                                   au monde son enfant. L’auteure anticipe
                                                                                   déjà dans les années 80 sur la question
                                                                                   de la maîtrise des femmes sur leurs
                                                                                   corps. Outre son féminisme qui nourrit
                                                                                   le quotidien de ses personnages, Claire
                                                                                   Bretecher se distinguera aussi par son
                                                                                   autonomie « d’artiste » dans la gestion de
                                                                                   sa carrière lorsqu’elle décide d’éditer ses
                                                                                   albums à compte d’auteur à partir des
                                                                                   années 1970, gardant ainsi, une véritable
                                                                                   indépendance éditoriale là ou d’autres
                                                                                   avaient fini par échouer. La gestion de sa
                                                                                   carrière ? L’ultime façon de se
                                                                                   revendiquer féministe à défaut de
                                                                                   militante.■



                                                                                                  Mars 2020 • GRAZIA MAROC  − 23
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