Après l’affaire Hajar Raissouni, finalement graciée par le Roi Mohammed VI, l’opinion publique est aujourd’hui très secouée par l'affaire d'un autre citoyen, celle de l’arrestation du journaliste et militant des droits humains Omar Radi. Le jeune homme de 33 ans a été poursuivi pour « outrage à magistrat ». Placé en détention ce 26 décembre, le tribunal de première instance d’Aïn Sebaâ a rejeté sa remise en liberté provisoire. Il se trouve désormais incarcéré à la prison de Casablanca, en attendant la prochaine audience le 2 janvier prochain. Son crime : un tweet posté en avril dernier où il dénonçait le verdict d’un magistrat marocain qui avait condamné jusqu'à 20 ans de prison plusieurs membres du Hirak marocain, mouvement de contestation sociale qui avait agité le Nord du Royaume en 2016 et 2017. « Lahcen Talfi, juge de la cour d'appel, bourreau de nos frères, souvenons-nous bien de lui. Dans beaucoup de régimes, les petits bras comme lui sont revenus supplier après en prétendant avoir exécuté des ordres. Ni oubli ni pardon avec ces fonctionnaires sans dignité », écrit-il sous le colère de la colère. Suite à ça, il avait même été interpellé par la police judiciaire pour être entendu, mais on l’avait alors laissé tranquille. Jusqu’à ce que le procureur se saisisse à nouveau de l’affaire aujourd’hui. Pour beaucoup, ça sonne même comme une «vengeance». « J'ai reçu une convocation, orale puis écrite, de la part de la Brigade nationale de la police judiciaire(BNPJ). J'ignore les raisons de cette nouvelle convocation. Il y a 9 mois, j'avais été convoqué au même service de police pour une histoire de tweet », raconte Radi avant son inculpation. L’ouverture de son procès suscitera rapidement l’indignation de la population et dépassera même les frontières, puisque de nombreux médias étrangers se sont emparés de l’affaire, comme Le Monde et le New York Times. Nombre d’ONG ont dénoncé cette incarcération estimée « arbitraire », à l’instar de Freedom Now, l’Association Marocaine des Droits Humains (AMDH) et Reporters sans frontières qui réclament sa libération immédiate. Même refrain chez les militants des droits humains, les intellectuels et le Syndicat National de la Presse Marocaine (SNPM). Naturellement, la toile s’est également enflammée : sur les réseaux sociaux, la vague de solidarité envers le journaliste est très palpable. Depuis deux jours, on assiste à une mobilisation générale et de vives réactions sur Facebook, Twitter et Instagram. Plusieurs personnalités des médias et du monde politique, ainsi que de très nombreux internautes anonymes réclament tous la libération du jeune homme sous le hashtag #FreeOmarRadi. Beaucoup s’insurgent contre la « répression », « l’abus de pouvoir » et les « condamnations arbitraires », clamant que la « liberté de la presse » autant que la « liberté d’expression » doivent être prises en considération. D’autant qu’un nouveau code de la presse ne prévoyant plus de peines de prison est entré en vigueur depuis 2016… Or, de toute évidence, les journalistes continuent d’être poursuivis selon le Code pénal. Pour rappel, Omar Radi est poursuivi sur la base de l’article 263 du Code pénal, qui prévoit un mois à un an de prison et une amende de 250 à 5 000 dirhams pour quiconque se rend responsable d’un « outrage dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de cet exercice, envers un magistrat, un fonctionnaire public, un commandant ou agent de la force publique, soit par paroles, gestes, menaces, envoi ou remise d’objet quelconque, soit par écrit ou dessin non rendus publics ». Affaire à suivre…