C’est avec tristesse qu’on vient d’apprendre le décès de cette célèbre avocate, à l’âge de 93 ans, qui aura été l’une des doyennes du mouvement féministe. Reine du barreau, militante de la première heure pour les droits fondamentaux des femmes, Gisèle Halimi aura combattu toute sa vie pour des causes qui lui tiennent à cœur. A l’instar d’une Simone Veil, l’une des ses grandes amies, elle était la voix pour toutes les femmes. Déterminée, rebelle et perspicace, Gisèle s’est longtemps battue pour la libéralisation de l’avortement et la criminalisation du viol. Dénonçant haut et fort le sexisme depuis toute jeune, son parcours restera exemplaire. Née en Tunisie dans une famille juive, en 1927, elle a très tôt fait face aux inégalités entre les genres, comprenant rapidement qu’être une fille était une forme de « malédiction ». Déterminée à dénoncer l’injustice à la maison, et refusant d’être cantonnée aux tâches ménagères alors que ses frères en étaient dispensés, elle a fait une grève de la faim à seulement 10 ans. Résultat : la féministe en herbe a remporté sa première bataille. Celle d’une très longue liste. Quelques années plus tard, à 16 ans, alors que sa famille la pousse à épouser un riche marchand du double de son âge, Gisèle se révolte là encore et refuse de céder à la pression sociale. Elle impose ses idées et finit par s’envoler à Paris pour entamer des études de droit. Son destin, elle a voulu le prendre en main et suivre la route qui mène à la justice pour les femmes. De la justice tout court d’ailleurs. Puisque, à la trentaine, elle lutte ardemment pour l'indépendance de l’Algérie et de tous les pays colonisés. Elle fait entendre sa voix un peu partout et marque les esprits avec son franc parler, sa volonté de fer et son aplomb hors-pair. Vient ensuite un autre combat acharné, celui de l’avortement. En 1971, Gisèle installe fièrement son nom aux côtés des signataires du Manifeste des 343, publié par le Nouvel Observateur. Aux côtés de tant de femmes fortes qui assument leur avortement et ouvrent le débat sur l'accès au droit à l'interruption volontaire de grossesse. L’avocate mettra ainsi sa pierre à l’édifice en défendant magistralement une jeune fille poursuivie pour avoir avorter. Ce fameux procès de Bobigny restera dans les annales. Quatre ans plus tard, la loi Veil pour la libéralisation du droit à l'avortement verra le jour. Autre coup de maître : Gisèle défendra deux jeunes femmes victimes d'un viol collectif et finit par déclencher l'adoption d'une loi en 1980 qui définit le viol comme un crime. Les miracles s’enchaînent et la dame de fer poursuit ses combats au fil des années. Elle s’engagera notamment pour la dépénalisation de l'homosexualité ou encore pour l’abolition de la peine de mort. Rien ne l’a jamais arrêté, Gisèle allait toujours au bout de ses convictions et de ses valeurs. Une passionnée de justice qui se battait contre vents et marées pour obtenir gain de cause. C’était une femme, moderne et singulière, qui aura inspiré bien des générations de féministes. Après avoir mené tant de batailles sans relâche, elle mérite amplement le repos éternel...paix à son âme.