L’écrivain et poète Tahar Ben Jelloun signe son grand retour avec un nouveau roman qui traite de problématiques pointues comme la pédo-criminalité, la corruption ou encore la honte. Intitulé « Le miel et l’amertume » (Edition Gallimard), cette œuvre littéraire nous bouleverse par son fond de drame social. En effet, le roman raconte comment un couple de la classe moyenne marocaine, dans les années 1990-2000, a été totalement dévasté par le suicide de leur fille, victime d’un pédo-criminel. « En violant la jeune fille, en la poussant au suicide, cet homme qui agissait en toute impunité a, en quelque sorte, violé et suicidé toute la famille. Au départ de ce couple, il n’y avait pas d’histoire d’amour, c’était un mariage traditionnel où l’on se marie sans se connaître et où on apprend à se connaître en se mariant », raconte Tahar Ben Jelloun. « La France n’y a pas échappé, dans la mesure où la dénonciation de la pédo-criminalité est très récente. Dans la société marocaine, c’est la même chose, sauf que s’ajoute la notion de honte, très ancrée dans les mentalités. On préfère se taire plutôt que d’avoir honte, et le silence est le meilleur complice des criminels », poursuit –il.
L’histoire nous plonge dans la ville de Tanger au début des années 2000 et raconte le drame de Samia, une jeune fille de seize ans, victime d’un pédophile manipulateur qui agit en toute impunité. Honteuse et meurtrie, elle ne raconte rien à personne mais confie tout à son journal intime. Toute son histoire sera ainsi découverte après son suicide. Une tragédie qui bouleverse ses parents. Perdus dans les méandres du chagrin et de la corruption, une lueur d’espoir viendra cependant ramener un peu de lumière dans ce foyer en la personne du jeune africain Viad…
Dans ce roman poignant, l’auteur traite également de la question de l’immigration, des rapports de classe dans la société et de l’abus de pouvoir. A travers ses personnages, Moncef et Adam, il nous explique que l’un trouve le moyen de s’échapper de la honte et de l’humiliation, tandis que l’autre se retrouve piégé et doit subir « le comportement dictatorial et esclavagiste qui perdure dans une société feutrée où les rapports de classe et d’inégalité sont flagrants ».
Par Nafissa El Bouanani